Mardi 15 Juillet - INCURSION DANS LE MYTHIQUE YUKON

Etape du jour : 380 Kms

Paysage sur la route de Kluane

Voila, ça y est, notre aventure sur ces routes a commencé ce matin en quittant Haines et rentrant au Canada. Comme prévu nous traverserons le sud du mythique Yukon en 2 étapes avant de revenir à nouveau en Alaska.

Revenons sur notre dernière journée de navigation : le lundi 14 juillet. Fête nationale en France, jour normal ici. En voyant à nouveau le brouillard en me levant, je me suis félicité d'avoir attendu patiemment le sunset la veille. Comme pour le premier jour, un brouillard à nouveau épais recouvre l'océan et les terres émergées. Comme des langues de brume ondulant étrangement, des nuées épaisses, des volutes mouvantes qui tantôt dévalent des montagnes par les cols et les vallées en avalanche ouatée et inoffensives, et tantôt les cernent comme des titanesques ronds de fumée laissant apparaître les sommets; des "châles" qui comme un écran de fine dentelle recouvrent l'océan en laissant transparaitre de temps en temps les paysages. 

Ombres fantomatiques tentant de s'extraire de leur linceul cotonneux.

Certes c'est parfois glauque et sans profondeur de champs, mais bon de temps en temps…. Et puis cela nous rappelle que nous venons de vivre des journées rares sur la côte ouest, même en été; nous devons nous attendre à devoir composer avec les temps nuageux et pluvieux. 

Nous faisons escale à Juneau, capitale de l'Alaska… Bled sans intérêt pour ce que nous en découvrons. En fait, en reprenant la route maritime du Columbia (celle que vous avez sur "l'Odyssée…"), nous nous rendons compte que sans les escales longues et inutiles, pour Nous évidemment, nous aurions pu rejoindre Haines en un jour et une nuit de moins, sachant qu'en arrivant à Ketchikan dimanche matin, nous avions parcouru les 3/4 de notre itinéraire… C'est comme ça et il n'y avait pas d'autres choix pour rejoindre l'Alaska.

Les heures défilent lentement car la brume ne se lèvera pas et enfin, après la longue remontée du fjord Chilkoot aux eaux boueuses lourdes de sédiment, nous apercevons Haines et nous nous préparons pour le débarquement.

Il fait gris à Haines et avant de rejoindre notre motel nous décidons de visiter un peu le village. Mignons et naïfs que nous sommes!!!! Nous le traversons en "speed limite 25 MPH" en 45 secondes…. Il y règne une profonde désolation et un ennui qui doit donner envie de se pendre à plus d'un. Et pourtant nous sommes en Eté; je vous laisse imagine le "bled de M..." en hiver dans la nuit noire qui dure 5 mois, quand souffle sur la neige déjà épaisse un blizzard glacé.. On comprend mieux pourquoi toutes les classes moyennes que nous rencontrons rêvent de Miami….

Mardi 15 Juillet, départ très tôt car nous reperdrons une heure en passant la frontière canadienne. Les 40 premiers miles avant la frontière sont ternes. Nous longeons un fjord aux eaux stagnantes chargées de bois flottés sous un ciel de plomb. Puis, en prenant de l'altitude sur la Haines Highway nous sortons des nuages et la route merveilleuse commence. La frontière avec un gros "poupon" de douanier qui gardera son air sévère. Je m'aperçois que le Gars se nomme "LAROSE" (nom Québécois), j'essaie donc en français pour le dérider, peine perdue le type s'évertuera à "mâchouiller" un anglais à l'accent impénétrable. Peut-être vivait-il mal sa mutation dans ce trou, résultat d'une punition???

Enfin nous roulons sur des hauts plateaux et découvrons des paysages infinis, splendides, grandioses… Je sais, je me répète mais croyez moi c'est tellement beau et si différent de chez Nous : par l'immensité de chaque horizon, par la variété des couleurs, par la démesure de tout - Plaines, rivières, montagnes, vallées, glaciers gigantesques par dizaines, lacs qui feraient passer ceux d'Annecy et du Bourget pour des étangs de la Dombe- … Une échelle de titans! Et le plus enivrant est que nous sommes seuls dans ce décor de rêve.

Et puis, et puis le suprême bonheur, nous rencontrons "Prosper et Raymond", 2 ours brun et noir qui s'offrent leur "petits dej" au bord de la route. (2 premières photos que je dédie à mon ami Thomas M, gros Nounours de son état et qui comme tout plantigrade affectueux se reconnaitra….)

La Haines highway traverse les territoires des  Nations "Champagne" (Nom certainement donné par des trappeurs d'origine française ;-)) et Aishishik. 

Les noeuds des vallées était les lieux de rencontres avec la nation Tlinglit qui échangeaient les produits et gardaient secrètes les routes et les passes….

Ces nations (tribus) retrouvent ces dernières années la maitrise de leurs territoires ancestraux grâce à des pactes avec l'état Canadien et le Yukon ; ils maintiennent leurs traditions de chasse, de pêche, de cueillette, d'art. Ils participent à la gestion de cet immense parc national de Kluane en y retrouvant le droit de chasse pour leur consommation personnelle.

Petite incursion au Kathleen Lake, ravissant joyaux turquoise, ou frétillent des Toulalis et des saumons Kokanne, une variété piégée lorsque la rivière Alsek qu'ils remontaient a été bloquée par un barrage naturel fait par un glacier,  ils ne pouvaient donc plus retourner en Mer. Bloquée par le glacier, l'Aslek River a créé au fil des ans une véritable mer intérieure d'eau douce.

En 1850 le glacier s'est effondré, l'eau de la rivière piégée dans le lac immense s'est échappée dans la vallée, faisant des dizaines de morts parmi les indiens. Mais les saumons sont restés dans les lacs, perdant leur instinct migratoire.

Jusqu'au Kluane Lake nous longeons sans pouvoir l'admirer un ensemble de chaînes de montagnes et de glaciers. Le Mont Logaan, le plus haut sommet du Canada : 5959 M s'y trouve. Le seul moyen d'y parvenir hors 10 jours de treks reste l'avion. (pas mal de petites compagnies le propose, mais bon c'est pas donné et on peut pas tout faire…) Si vous souhaitez mieux visualiser cette magnifique région que nous traversons, allez sur "Gogol Map" et frappez Haines, Skagway et Kluane Lake.

Ah j'oubliais, en rentrant dans le Yukon, toutes les infos sont dans les 2 langues (français et anglais) et les panneaux et les vitesses autorisées en kilomètres. "Pas belle lavie…??" 

Seul bémol, les "Yukon...nais" (je n'ose pas Yukon…nards) ne jactent qu'en anglais incompréhensible, même pour BB c'est vous dire…)

En milieu d'AM nous rejoignons notre motel à "Destruction Bay" - En découvrant l'état délabré du"complexe" station service, garage à camions, motel, supérette, bar "lounge", et cafétéria, nous nous disons qu'il n'y a pas que la baie qui est voie de "destruction"….(lol)

Bises à Tous Béa et Hubert.