dimanche 13 juillet 2014

Dimanche 13 juillet - L'ODYSSEE DU COLUMBIA



(Retour sur l'AM du Samedi 12) - Dès que nous sortîmes du brouillard, l'après midi devînt féérique; nous la passâmes sur le "deck 7", alternant entre tribord et bâbord, entre lecture de nos thrillers et visions  merveilleuses de ce magnifique paysage.
Comment décrire ces paysages d'une beauté saisissante, comment leur rendre pleinement hommage en les photographiant? Comment vous parler de cette nature époustouflante, comme surgie d'un autre monde? Imaginez des montagnes rocheuses, recouvertes d'une telle densité de sapins qu'elles en sont impénétrables, qui plongent dans l'océan. Parfois, des anciens éboulements tracent des saignées de roche à vif dans la montagne, qui restent à nu, éternelles cicatrices de pierre brute que respectent les sapins.
 A quelques mètres au dessus des eaux la nature étend un rideau totalement opaque de résineux; je l'ai déjà écrit mais le contraste entre le vert des forêts à l'infini et le bleu acide ou turquoise du Pacifique est exceptionnel. En plus, imaginez qu'en fonction de l'inclinaison du soleil toutes ces couleurs s'éclaircissent légèrement ou se densifient, renouvelant ainsi comme dans un kaléidoscope sans fin la diversité de la Nature. MAGNIFIQUE !!!!!
Nous passerons donc toute l'AM accoudés aux bastinguages du Pont 7, nous enivrant de ces splendeurs, en souhaitant que Serge et Guigui qui ne nous quittent pas un instant les voient à travers Nous. Comme ils auraient adorés ces moments, comme Nous les yeux écarquillés, tachant de graver chaque instant de manière indélébile. Pourquoi faut-il qu'on nous arrache le meilleur de Nous mêmes et nous obliger à vivre avec ça??? 
Je reste sur le pont jusqu'au "sunset" vers 21H40, attend une nuit qui ne tombe plus vraiment sur ces latitudes; un peu comme un long crépuscule jusqu'au lever de soleil de 3H30 du matin….
Le Columbia trace donc sa route depuis Billingham au coeur de cette nature intacte depuis les premiers matins du monde, cette nature inexploitée et pas souillée par l'Homme. 
Au milieu d'un entrelacs de chenaux, d'un dédale de passages et de canaux naturels et d'une" nébuleuse" d'îles et d'ilots splendides d'où dévalent en cascade et rapides des torrents tumultueux et fumants, notre ferry poursuit sa navigation avec obstination, tel la galère d'Ulysse qui le ramenait vers Ithaque et la Divine Pénélope….Sauf qu'en Méditerranée le vaillant Ulysse n'aura pu admirer la  beauté grandiose des côtes du Pacifique Nord; pour notre part nous ne rencontrerons pas la Nymphe Calypso, ni le Cyclope ni surtout les Sirènes aux charmes sulfureux et aux chants fatidiques!!!!
(Houla, je me suis un peu égaré…- Comme dirait Nadine, je me suis même un peu "perché"!!!)
REPRENONS DONC LE COURS : après avoir longé les côtes de la Colombie britannique, notre Ferry s'est infiltré dans le fameux "inside passage", coincé entre le continent et l'océan. Cette terre découpée de 150 Kms de large pour plus de 750 Kms de long offre plus de 24.000Kms de côtes et plus de 1.OOO îles….!!! 

Plus qu'une séparation tellurique du Continent, ce dédale semble être le fruit de la fin de la dernière glaciation. Lors de la fonte des glaces, l'océan s'engouffra dans les anciennes vallées glacières, noyant les plaines et les plateaux et créant ainsi le "passage intérieur". En tout cas cela ressemble beaucoup au dédale de fjords, rias, canaux et détroits que l'on trouve au bout du continent sud-américain entre Atlantique et Pacifique. Sur ces terres désolées mais intactes elles aussi de la Terre de Feu; là où les 40èmes rugissants vous font soit regretter d'être venus, soit vous font ressentir viscéralement la force et la beauté de cette Nature sereine dans sa majestueuse immuabilité.
Au total l'odyssée parcourra environ 2.700 Kms le long des côtes ouest de l'Amérique du Nord; quelques escales sont prévues comme celle de ce matin à Ketchikan, à l'extrême sud-Est du 49ème état (l'Alaska).

Ce matin à l'instar de la veille les premiers levés sont les "vieux"; comme Nous quoi qui sommes debout à 7HOO du mat en pensant avoir enfin fait une grasse mat et apprenant que nous sommes passé en "Alaska Time" et que nous perdons une heure de plus (donc le lever en Alaska Time = 6HOO…!!!)
Revenons un peu sur ce microcosme américain embarqué dans cette odyssée commune : des jeunes évidemment mais finalement minoritaires par rapport aux retraités avancés que nous croisons le matin et ensuite dans les coursives. Impressionnant leur extrême difficulté à se mouvoir sur un bateau qui, finalement, navigue sur une mer d'huile. Leur dos vouté, leur corps démoli, leur articulations en lambeaux, les cannes branlantes au bout de bras décharnés et usés, qui arpentent à pas mesurés et brinquebalant le lino des coursives; les pauvres ahanent et souffrent qd il s'agit de monter aux ponts supérieurs; ils nous laissent passer car difficile de se croiser, de peur d'effacer à force d'attendre notre bienveillance. Certains se déplacent carrément sur une "chaise électrique" (lol) un fauteuil plutôt…. Quoique en les observant aussi proches de l'absolue certitude, j'en arrive à imaginer que le Columbia les ramène vers le "grand départ", comme si ce ferry n'était qu'un sas, qu'un passage lui aussi pour une Odyssée éternelle - un tunnel rituel vers le grand inconnu. ( Houla, je me suis encore perché…..Très haut cette fois!!!) .

Ce dimanche donc nous vivrons une heure de plus et après notre observation du "dernier âge", le Columbia s'amarre au port de KETCHIKAN, 4ème ville de l'Alaska avec ses 14.000 âmes. En fait un bled qui s'étire sur une île isolée au bout de l'Alaska. Un "bled" qui a fait sa renommée autour de la ruée vers l'or, dont il était un point de passage incontournable, et surtout de la pêche du saumon, abondant toute l'année, qui lui aura permis de développer une petite économie.
Nous sommes ici sur la terre des TLINGITS qui, déjà et depuis des temps immémoriaux, passaient l'été à se goinfrer de saumon et à le stocker en vue de l'hiver (voir ci dessous l'instant culture).
Cette tribu a développé l'art de construire et sculpter des immenses totems colorés qu'ils dédiaient à leurs ancêtres. Les totems racontaient leur vie de famille, comme un moyen de se transmettre leur histoire à travers les générations. Aucune connotation religieuse.

séquence "le saviez-vous? : 

Les Tlingits sont une nation autochtone d’Amérique du Nord et occupent  la zone côtière du sud-est de l’Alaska et les îles qui lui font face. Ils ont développé une culture complexe basée sur la chasse et la cueillette dans les forêts tempérées humides de la région. Le saumon était la base de leur nourriture. Ils ramassaient les coquillages sur les plages et, dans les forêts, les baies et les végétaux comestibles.
Ils utilisaient pour la pêche en mer des pirogues creusées dans des troncs de cèdres et qui pouvaient dépasser vingt mètres de long. Ils ne craignaient pas d’affronter baleines et orques. Ils habitaient de grandes maisons faite de planches de cèdre. Les hommes étaient habiles à sculpter le bois et les femmes à la fabrication de paniers et d’étoffes faites avec des écorces. Les Tlingits étaient aussi de très habiles commerçants, troquant les peaux, l’huile de baleine, les coquillages et le cuivre. La langue tlingite est connue non seulement pour sa grammaire complexe mais aussi pour utiliser certains phonèmes que l’on n’entend pas dans la presque totalité des autres langues.
A la fin de la ruée vers l'or, Ketchikan s'était endormie sur l'exploitation du saumon. Sauf que depuis QQ années, ce bled du bout du monde retrouve son second souffle consumériste grâce à une nouvelle ruée : celle des grands bateaux de croisière, véritables villes flottantes qui débarquent un flot intarissable de touristes, les poches gonflées de liasses du précieux billet vert!!!! Les mineurs, les pêcheurs, les bucherons et les ouvrières des conserveries d'antan sont devenues commerçants. 
Tous les "estancos" délabrés disponibles ont été convertis en boutiques de laides bimbeloteries "made in China" pour les uns, ou en galeries de "natives artistes" pour les autres, dont l'art le plus abouti consiste à soulager les "gogos" de leurs dollars….!!!! Certains vont penser que comme d'hab je me lâche - Ils n'auront pas totalement tort, car pour nous certaines peintures étaient originales dans leur symbolique tribale, par contre au prix où elles étaient affichées, il fallait avoir le portefeuille bien garni ou l'âme d'un mécène pour les acquérir. 
A 11HOO, nous "lunchons" chez "Chico's", sympathique restaurant mexicain perdu en ces terres glacées. Et en dégustant une Corona et une Pacifico (la Mamma était en panne de Dos Equis), nous regardons la première mi-temps de la finale entre l'Allemagne et l'Argentine. Etant les seuls français entourés d'hispanisants mexicains fervents supporters des argentins, j'ai fait de la "provoc" en supportant les allemands et en prédisant la défaite des argentins…!!! Ceux qui me connaissent (Henri Z, Fred B, mon Fils à Moi…) ne le croiront pas. Et pourtant… Si, si j'ai supporté les "teutons flingueurs" devant une "armada" de mexicains débonnaires. Fallait-il que je sois très loin de chez moi…???
A 14H00 le Columbia largue les amarres, retrouve sa route à travers ces terres de beauté et, sous un soleil de plomb, ainsi qu'un ciel bleu azur poursuit son ODYSSEE.


2 commentaires:

  1. Voyage en "humanité" et en "condition humaine" ! Il y a de forts symboles dans ce billet et un certain "sens de l'orientation" !

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  2. C'est magnifique ces paysages époustouflant ,en espérant que Serge et Guigui les voient c'est sur qui auraient adorer, et ils nous manquent tellement. Je suis pas à pas vos commentaires ,je vous suis de très près. Je me languis la suite qui va être passionnante.Gros gros bisous
    SERGUEIETTE

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